Repos hebdomadaire : travailler 12 jours d’affilée, c’est désormais légal
La Cour de cassation change la règle : ce n’est plus le nombre de jours consécutifs qui compte, mais la présence d’un repos dans chaque semaine civile. Résultat : un salarié peut désormais travailler jusqu’à 12 jours d’affilée tout en restant dans le cadre légal, tant qu’un jour de repos apparaît entre chaque lundi et dimanche. Une évolution qui oblige les employeurs à revoir l’organisation du temps de travail.
Le repos hebdomadaire doit maintenant être compté par semaine, du lundi au dimanche. Cela signifie qu’un salarié peut parfois travailler jusqu’à 12 jours d’affilée, tant que chaque semaine comprend un jour de repos. Les employeurs doivent donc adapter l’organisation du travail et les plannings.
Chaque salarié doit avoir au moins 24 heures de repos par semaine (une journée complète sans travailler), plus 11 heures de repos entre deux prises de poste, soit au moins 35 heures d’affilée. Ce repos doit normalement tomber le dimanche, sauf exceptions.
L’ambiguïté juridique
Pendant des années, une question divisait juristes et tribunaux : le repos devait-il être accordé au plus tard après 6 jours de travail consécutifs, ou suffisait-il qu’il figure dans chaque semaine civile ? Cette incertitude créait une insécurité juridique majeure jusqu’à l’arrêt du 13 novembre 2025.
La décision de la Cour de cassation
Le principe de la semaine civile
La Cour de cassation tranche définitivement : « pour vérifier si le repos hebdomadaire est respecté, il faut se fonder sur une période de référence allant du lundi 0h00 au dimanche 24 heures ». Il n’existe donc aucune interdiction légale de dépasser 6 jours consécutifs, dès lors que chaque semaine civile comporte un repos de 24h consécutives + 11h de repos quotidien.
Conséquence : Un salarié peut travailler jusqu’à 12 jours consécutifs si chaque semaine civile comporte un repos conforme.
Les faits de l’affaire
L’affaire concernait un directeur des ventes qui avait travaillé 11 jours consécutifs (3-13 avril 2018) puis 12 jours consécutifs (3-14 septembre 2018). Dans les deux cas, chaque semaine civile comportait un jour de repos, mais le salarié arguait qu’aucun travailleur ne pouvait légalement dépasser 6 jours d’affilée. La Cour rejette cette interprétation et valide les plannings de l’employeur.
Repos lundi → Travail du mardi au vendredi suivant
Conforme
9 jours
Travail samedi-dimanche → Repos lundi → Travail mardi-dimanche
Conforme
Exemple concret novembre 2025
Un salarié peut se reposer le lundi 17 novembre, travailler du mardi 18 au dimanche 24 (6j), puis du lundi 25 novembre au dimanche 1er décembre (7j), et se reposer le lundi 2 décembre. Résultat : 12 jours consécutifs, mais légal car chaque semaine civile comporte un repos.
Actions pour les services RH
Auditer les plannings actuels
Paramétrer les logiciels GTA sur la semaine civile
Former les managers aux nouvelles règles
Vérifier les conventions collectives (certaines interdisent plus de 6 jours)
Limites et obligations
Durées maximales de travail
Limite légale
Durée maximale
Référence
Quotidienne
10 heures/jour
Art. L3121-34
Hebdomadaire
48 heures/semaine
Art. L3121-35
Moyenne 12 semaines
44 heures
Art. L3121-35
Dérogation exceptionnelle
60 heures
Art. L3121-36
Attention : Sur une séquence de 12 jours couvrant 2 semaines complètes, pour respecter les 48h maximum hebdomadaires, la durée journalière moyenne ne peut dépasser ~6h50.
Obligation de sécurité
La Cour rappelle que « l’employeur demeure tenu d’une obligation générale de sécurité ». Même si un planning est formellement conforme, l’employeur peut être condamné si les longues séquences causent fatigue excessive, stress ou problèmes de santé. Les mesures de prévention sont indispensables : pauses, rotation des tâches, surveillance médicale.
Secteurs particulièrement concernés
Certains secteurs d’activité tirent particulièrement profit de cette nouvelle jurisprudence en raison de leurs contraintes opérationnelles spécifiques.
Hôtellerie-restauration
Activité 7j/7 avec forte saisonnalité et pics d’affluence (week-ends, vacances, événements). La flexibilité facilite l’adaptation aux variations d’activité. Risques : pénibilité physique, horaires décalés, chaleur en cuisine.
Commerce et distribution
Soldes, Black Friday, fêtes de fin d’année génèrent des besoins ponctuels. Possibilité d’organiser des séquences longues temporaires. Risques : station debout prolongée, manutention, contact clientèle.
Événementiel et spectacles
Festivals, salons, tournées s’étalant sur plusieurs jours consécutifs. L’arrêt sécurise juridiquement ces pratiques courantes. Risques : manutention de matériel, horaires très décalés, stress important.
Services à continuité
Santé, sécurité, transports nécessitent une présence 24h/24. Systèmes de roulement pouvant conduire à des séquences longues. Risques : articulation avec les réglementations sectorielles spécifiques.
Recommandations pour les services RH
Face à cette jurisprudence, les services RH doivent adopter une démarche équilibrée entre flexibilité et responsabilité :
Audit des plannings : Vérifier la conformité des plannings actuels avec le principe de la semaine civile
Conventions collectives : Contrôler si votre convention interdit le travail au-delà de 6 jours consécutifs (principe de faveur)
Outils GTA : Paramétrer les logiciels pour vérifier automatiquement le repos hebdomadaire dans chaque semaine civile
Formation : Former les managers aux nouvelles règles et aux limites à respecter (durées maximales, obligation de sécurité)
Prévention : Évaluer les risques professionnels par poste et mettre en place des mesures adaptées (pauses, rotation, surveillance médicale)
Traçabilité : Conserver tous les plannings pendant 5 ans (charge de la preuve incombe à l’employeur)
La sécurité juridique apportée par cet arrêt ne dispense pas d’une gestion responsable du temps de travail. L’obligation de sécurité reste pleinement applicable et pourrait devenir le principal terrain de contestation des longues séquences.
Questions fréquentes
Mon employeur peut-il m’imposer de travailler 12 jours d’affilée ?
Oui, si chaque semaine civile comporte un repos de 24h + 11h de repos quotidien, et si les durées maximales sont respectées. Votre convention collective peut toutefois interdire plus de 6 jours consécutifs. Si cette organisation nuit à votre santé, vous pouvez la contester sur le fondement de l’obligation de sécurité.
Quels sont mes recours si mon employeur abuse de cette possibilité ?
Vérifiez si votre convention collective interdit plus de 6 jours consécutifs (recours prud’homal possible), alertez le médecin du travail si votre santé est affectée, contestez pour manquement à l’obligation de sécurité (droit à dommages-intérêts), ou saisissez l’inspection du travail en cas de dépassement des durées maximales de travail.
Cette jurisprudence peut-elle évoluer ou être remise en cause ?
Oui. Le législateur pourrait modifier le Code du travail pour interdire explicitement plus de 6 jours consécutifs (peu probable à court terme). La Cour de justice de l’Union européenne pourrait aussi juger cette interprétation contraire à la directive européenne 2003/88/CE. Enfin, la jurisprudence pourrait évoluer sur le terrain de l’obligation de sécurité pour mieux encadrer les longues séquences.
Dernière mise à jour : novembre 2025. Les informations sont données à titre informatif et ne constituent pas un conseil juridique. Consultez un avocat spécialisé pour toute situation spécifique.
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