Depuis le début de l’année 2025, le gouvernement a mis en œuvre une série de réformes de l’assurance chômage visant à adapter le système aux réalités économiques actuelles et futures.
Ces changements, résultant d’accords entre les partenaires sociaux et le gouvernement, modifient les conditions d’indemnisation et d’éligibilité pour les demandeurs d’emploi. Cet article examine en détail les nouvelles règles d’assurance chômage et leur impact sur les travailleurs.
Rappel sur l’assurance-chômage et son fonctionnement
Fondée en 1958 par les organisations patronales et les syndicats de salariés, l’assurance-chômage ou allocation chômage est un système de protection sociale pour les personnes sans emploi.
Elle prend la forme d’un revenu versé aux salariés qui ont fait l’objet d’une procédure de licenciement pour motif économique, sous certaines conditions. Le montant est proportionnel à l’ancien salaire de l’employé au chômage, soit 72 % de l’ancien salaire net en moyenne.
L’allocation chômage fonctionne comme un filet de sécurité et permet de maintenir le pouvoir d’achat des salariés pour la période de transition entre la perte d’un travail et un nouvel emploi. Elle peut durer jusqu’à 18 mois ou 27 mois pour les personnes de 55 ans et plus.
Elle est une assurance obligatoire à laquelle cotisent tous les employeurs. Même ceux qui travaillent en intérim ou qui font du portage salarial doivent s’y soumettre. Les cotisations représentent 4,05 % du salaire brut, à la charge de l’employeur. L’État participe également au financement.
Qui fixe les règles de l’assurance-chômage ?
En règle générale, les règles de l’assurance-chômage sont fixées par les organisations patronales et les syndicats des salariés tous les deux ou trois ans. Les négociations tiennent compte de l’évolution du marché du travail et du contexte socio-économique.
S’il y a accord entre les deux parties, elles concluent une convention qu’elles soumettent au gouvernement pour validation, via un agrément du Premier ministre. Une fois agréée, la convention devient obligatoire.
Les conditions pour toucher une assurance-chômage
Plusieurs conditions doivent être réunies :
- S’inscrire à France Travail (ex Pôle Emploi).
- Avoir perdu son emploi de manière involontaire (licenciement, fin d’un CDD, fin de mission, etc.).
- Avoir travaillé au moins 6 mois (soit 130 jours ou 910 heures de travail) en tant que salarié au cours des 24 derniers mois ou 36 derniers mois pour les salariés de plus de 53 ans.
- Être apte au travail.
- Résider en France métropolitaine, dans un département d’outre-mer ou bien dans une collectivité d’outre-mer concernée par ce régime.
Les Français ont une vision déformée du profil des chômeurs
Pour 37 % des Français, les chômeurs sont des personnes qui ne veulent pas travailler, par fainéantise ou incompétence. Pour les demandeurs d’emploi, il s’agit d’une situation subie, indépendante de leur volonté (faiblesse du dynamisme économique, manque d’offres d’emploi, etc.).
Après le sixième volet du baromètre Unédic de la perception du chômage et de l’emploi, une vidéo d’échange sur la situation permet de changer cette vision déformée du profil des chômeurs en France. Elle met également l’attachement de plus de la moitié des Français à l’assurance-chômage.
Le contrat de sécurisation professionnelle (CSP), en aide aux chômeurs
Outre l’assurance-chômage, certains salariés ayant perdu leur emploi pour motif économique ont droit au contrat de sécurisation professionnelle pour une durée de 12 mois maximum afin de favoriser leur retour à l’emploi. Ce dispositif qui devait prendre fin au 31 décembre 2024 est prolongé jusqu’au 31 décembre 2025.
Il concerne tous les salariés justifiant d’un an d’ancienneté et travaillant dans une entreprise de moins de 1000 salariés.
Si le salarié est toujours en recherche d’emploi après le CSP, il peut percevoir l’ARE (aide au retour à l’emploi).
Assurance-chômage : qu’est-ce qui change au 1er février 2023 ?
Pour faire face aux incertitudes d’un marché du travail en constante évolution et à des défis économiques persistants, le gouvernement français, en collaboration avec les partenaires sociaux, a entrepris une série de réformes sur le système d’assurance chômage. Ces réformes visent à garantir la pérennité financière du régime tout en offrant une protection adaptée aux demandeurs d’emploi, mais aussi à encourager le retour à l’emploi et à responsabiliser les employeurs dans leur gestion des ressources humaines.
Depuis le 1er février 2023, la durée d’indemnisation est réduite de 25 % pour la plupart des demandeurs d’emploi, avec une durée minimale garantie de 6 mois. Par exemple, une personne qui aurait pu prétendre à 12 mois d’indemnisation avant la réforme ne pourra désormais bénéficier que de 9 mois d’allocations.
Cette modulation est ajustée en fonction de l’évolution de la situation du marché de l’emploi : en cas de dégradation significative, notamment si le taux de chômage dépasse 9 %, un complément de fin de droit peut prolonger la durée d’indemnisation.
En outre, la durée des droits à l’indemnisation de l’assurance chômage tient compte de l’âge du demandeur d’emploi et du nombre de jours de travail qu’il a effectué en tant que salarié. Pour connaître le nombre de jours auxquels les demandeurs d’emploi ont droit à l’allocation chômage, il faut multiplier le nombre de jours de travail effectué par 1,4.
Par exemple, un demandeur qui a effectué un emploi salarié pendant 200 jours a droit à l’allocation chômage pendant 280 jours (200 x 1,4).
De plus, la période maximale pendant laquelle les demandeurs d’emploi peuvent bénéficier de l’allocation chômage dépend de l’âge :
- Pour les moins de 53 ans, les droits à l’allocation chômage sont limités à un maximum de 730 jours.
- Pour les personnes âgées entre 53 et 54 ans, les droits à l’allocation chômage sont limités à un maximum de 910 jours.
- Pour les plus de 55 ans, les droits à l’allocation chômage sont limités à un maximum de 1 095 jours.
Ces mesures s’inscrivent dans une volonté d’encourager un retour rapide à l’emploi en réduisant la période pendant laquelle les bénéficiaires perçoivent une aide financière et ainsi réduire le taux de chômage à 5 %.
Pour rappel, le salaire journalier de référence a augmenté de 1,2 % depuis le 1er juillet 2024.
La nouvelle convention du 15 novembre 2024 fixe les nouvelles règles de l’assurance-chômage au 1er janvier 2025
Formalisée par une partie des partenaires sociaux et agréée par le Premier ministre en date du 19 décembre 2024, la convention du 15 novembre 2024, entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2025 fixe l’ensemble de la règlementation pour une durée de 4 ans, jusqu’au 31 octobre 2028. Toutefois, certaines nouvelles règles n’entreront en vigueur que le 1er avril 2025 pour des raisons opérationnelles.
C’est le cas de la réduction de la condition d’affiliation à 5 mois pour les demandeurs d’emploi n’ayant pas bénéficié d’une précédente ouverture de droits au cours des 20 dernières années.
Cette mesure nécessite une base légale pour être applicable.
C’est également le cas de l’application du coefficient sur le salaire de référence lorsque des rémunérations perçues à l’étranger sont prises en compte dans le calcul de l’ARE et de la limitation à 3 mois du cumul de l’ARE avec un emploi exercé à l’étranger. Ces mesures seraient contraires au règlement européen n ° 883/2004.
Décalage du maintien des allocations pour les seniors
Le gouvernement entend décaler progressivement l’âge à compter duquel le maintien de l’allocation est possible. Dans les détails, les personnes proches de la retraite qui sont au chômage et qui n’ont pas tous leurs trimestres pour une retraite à taux plein ont la possibilité de maintenir leur allocation jusqu’à atteindre l’âge de leur taux plein.
Le calcul de la durée d’indemnisation
À partir du 1er avril 2025, le calcul de la durée d’indemnisation prend en compte au maximum 70 % du nombre de jours non travaillés, au lieu de 75 %.
Le taux de la contribution patronale diminue à partir du 1er mai 2025
Au 1er mai 2025, elle passera de 4,05 % à 4 %.
Le dispositif bonus-malus évolue
la contribution ds employeurs à l’assurance-chômage diminue de 0,5 point à partir du 1er mai 2025.
Par ailleurs, la formule de calcul du taux de contribution modulé évolue à partir du 1er septembre 2025 jusqu’au 28 février 2026.
Une vidéo de l’Unédic du 21 janvier permet de comprendre son rôle dans les négociations d’assurance chômage
Le 21 janvier, l’Unédic a diffusé une série de documentaires permettant de se plonger dans les coulisses des négociations de l’assurance chômage qui se sont déroulées du 22 octobre au 14 novembre 2024.
Cette vidéo démontre les talents mobilisés par l’Unédic pour éclairer les décisions des partenaires sociaux. Elle est accessible en ligne pour ceux qui sont intéressés.
Quels sont les impacts des nouvelles règles de 2024 sur les travailleurs à partir du 1er avril 2025 ?
La réforme de l’assurance chômage suscite des réactions contrastées au sein de la société. Si le gouvernement met en avant un dispositif plus incitatif au retour à l’emploi, les syndicats dénoncent un durcissement des conditions d’accès aux allocations. Les impacts varient selon les catégories de travailleurs.
Réduction de la condition minimale de travail à 5 mois
Auparavant, il fallait au moins 6 mois de travail pour que les travailleurs saisonniers puissent être indemnisés. Aujouird’hui, il n’en faut plus que 5 mois, avec une durée d’indemnisation minimale correspondant à 5 mois.
Versement mensuel de l’allocation
Le montant de l’allocation est désormais calculé sur la base de 30 jours calendaires par mois. Pour les demandeurs d’emploi n’ayant pas travaillé sur une année entière, cette mesure entraîne une perte d’indemnités de 5 jours par an (pour les mois se terminant au 31) et 6 pour les années bissextiles.
Décalage de 2 ans des conditions d’âge pour l’application des dispositions spécifiques pour les allocataires séniors
Pour les salariés de 55 ans et plus (contre 53 auparavant), les périodes de travail prises en compte pour déterminer l’allocation chômage sont recherchées dans les 36 derniers mois précédant la fin de contrat de travail (pour les autres, les périodes prises en compte sont recherchées dans les 24 mois).
Par ailleurs, les durées d’indemnisation maximales sont de 22,5 mois ou 685 jours pour les allocataires âgés de 55 ans et 56 ans à la date de fin de contrat de travail (au lieu de 53 et 54 ans) et de 27 mois ou 822 jours pour les allocataires âgés de 57 ans et plus à la date de fin de contrat de travail (au lieu de 55 ans et plus). Pour les autres demandeurs d’emploi, la durée maximale d’indemnisation est de 18 mois.
Allongement de la durée d’indemnisation, sous conditions
Tous les allocataires âgés de 55 ans et plus à la date de fin de contrat de travail bénéficient d’un allongement de la durée d’indemnisation, dans la limite de 137 jours, en cas de suivi d’une formation en cours d’indemnisation. Cette possibilité était auparavant réservée aux allocataires de 53 et 54 ans.
Assouplissement de la dégressivité de l’allocation pour les hauts revenus
La dégressivité de l’allocation qui s’applique aux demandeurs d’emploi percevant une indemnité journalière de plus de 92,12 euros est applicable aux moins de 55 ans. Pour rappel, il fallait avoir au moins 57 ans pour profiter de cette dégressivité.
Maintien de l’allocation jusqu’à la retraite au taux plein
Pour répondre à la réforme des retraites de 2023, qui fixe l’âge légal de départ à 64 ans d’ici 2030, le dispositif de maintien de droit permettant aux chômeurs en fin de droit de continuer à toucher leur allocation jusqu’à l’âge du départ à taux plein va progressivement passer de 62 à 64 ans.
Des conditions d’éligibilité plus souples pour les primo-demandeurs au 1er avril 2025
À partir du 1er avril 2025, les travailleurs saisonniers peuvent bénéficier d’une allocation chômage s’ils ont travaillé au moins 5 mois au cours des 24 derniers mois, contre 6 mois auparavant. Cette mesure vise à mieux protéger les travailleurs aux emplois précaires et à encourager leur retour à l’emploi.
Révision des règles d’allocation pour les transfrontaliers
Les travailleurs et travailleuses frontaliers (la Suisse, le Luxembourg, la Belgique, l’Allemagne et l’Espagne) qui résident en France cotisent à l’assurance chômage du pays où ils sont salariés.
En cas de perte d’emploi, ils reçoivent l’allocation de leur pays de résidence (règlement européen), calculée sur la base de leur salaire perçu à l’étranger.
Pourtant, ces pays ne reversent quasiment pas les cotisations qu’ils perçoivent au régime de l’assurance-chômage français. Ce qui entraîne une perte énorme pour l’Unédic.
La convention de 2024 prévoit d’appliquer des coefficients réducteurs qui feront baisser le montant des allocations chômage que les travailleurs transfrontaliers perçoivent en France. D’autres mesures sont également demandées à l’État français et à France Travail.
Durée d’affiliation spéciale pour les travailleurs saisonniers à compter du 1er mai 2025
À compter du 1er 2025, la durée d’affiliation minimale passe de 6 mois à 5 mois (108 jours travaillés ou 758 heures) pour les travailleurs saisonniers.
Plafonnement du cumul de l’ARE avec les revenus issus d’une activité non salariée
Un demandeur d’emploi qui crée ou reprend une entreprise tout en percevant des allocations chômage peut cumuler une partie de ces dernières avec les revenus de son activité non salariée. Le cumul ne peut pas être supérieur au salaire mensuel de référence.
Que pensent les partenaires sociaux des nouvelles règles de l’assurance chômage ?
Les partenaires sociaux restent divisés sur la pertinence de cette réforme. Tandis que le patronat soutient une approche visant à réduire le coût de l’assurance chômage et à stimuler le retour à l’emploi, les syndicats mettent en avant les risques de précarisation et demandent des ajustements pour les publics les plus vulnérables.
En tout cas, les nouvelles règles de l’assurance chômage marquent un tournant majeur dans la gestion de l’emploi et du chômage. Son efficacité dépendra de l’évolution du marché du travail et de l’accompagnement mis en place pour faciliter la transition des demandeurs d’emploi vers une réinsertion rapide et durable.
À court terme, il est probable que les effets soient contrastés. Certains chômeurs pourraient retrouver un emploi plus rapidement sous la contrainte des nouvelles règles, tandis que d’autres pourraient se retrouver dans des situations plus précaires.
À long terme, l’impact de ces mesures devra être évalué pour mesurer leur efficacité. Si le taux de chômage baisse durablement, le gouvernement pourra considérer que sa politique a porté ses fruits.
En revanche, si l’on constate une hausse du non-recours aux droits et une précarisation accrue, des ajustements seront probablement nécessaires.auto_awesome