Trois salariés en congé sabbatique : une femme allongée dans un hamac, un homme reprenant ses études et une femme en départ pour un tour du monde, chacun dans un environnement professionnel stylisé.
Le23 août 2025

Congé sabbatique : une pause qui change tout

Nos vies professionnelles sont souvent rythmées par l’urgence, les objectifs et les réunions à n’en plus finir. Dans ce quotidien effréné, l’idée de prendre une longue pause peut sembler irréaliste. Et pourtant, le droit du travail français offre une possibilité encore trop méconnue : le congé sabbatique. Le congé sabbatique, encadré par le Code du […]

Nos vies professionnelles sont souvent rythmées par l’urgence, les objectifs et les réunions à n’en plus finir. Dans ce quotidien effréné, l’idée de prendre une longue pause peut sembler irréaliste. Et pourtant, le droit du travail français offre une possibilité encore trop méconnue : le congé sabbatique. Le congé sabbatique, encadré par le Code du travail, offre aux salariés une pause de 6 à 11 mois. En France, moins de 1 % des salariés en bénéficient chaque année. Mais ceux qui le font parlent d’une expérience marquante de leur vie.

Une pause entre 6 et 11 mois, pourquoi faire ?

Entre six et onze mois loin du bureau, pour respirer, explorer, apprendre ou simplement prendre soin de soi ou des autres. Si ce droit reste aujourd’hui peu utilisé, il répond pourtant à une aspiration profonde : celle de redonner du sens à sa vie professionnelle en s’offrant une parenthèse personnelle.
En 2025, alors que santé mentale et équilibre de vie sont devenus des priorités, le congé sabbatique apparaît plus que jamais comme un outil à (re)découvrir.

Un droit garanti par le Code du travail

Le congé sabbatique n’est pas un privilège accordé au cas par cas : il est inscrit dans les articles L3142-28 à L3142-35 du Code du travail. Concrètement, il s’agit d’une suspension du contrat de travail à l’initiative du salarié.

Durant cette période, aucun salaire n’est versé, mais le lien contractuel reste intact. Le salarié conserve donc la garantie de retrouver son poste – ou, à défaut, un emploi équivalent – à la fin de sa pause.

L’autre originalité du dispositif est sa liberté : contrairement au congé de formation ou au congé pour création d’entreprise, le salarié n’a pas à expliquer son projet. Voyager, écrire, se former, s’occuper de ses proches, s’engager dans une association ou même ne rien faire… le congé sabbatique appartient à celui qui le prend.

Une demande simple mais encadrée

Ce droit n’est pas ouvert à tout le monde, ni à n’importe quel moment de la carrière. Pour en bénéficier, il faut remplir trois conditions :

  • Justifier d’au moins 36 mois d’ancienneté dans l’entreprise.
  • Compter six années d’activité professionnelle au total.
  • Ne pas avoir profité, au cours des six dernières années, d’un congé sabbatique, d’un congé pour création d’entreprise ou d’un congé individuel de formation supérieur à six mois.

Autrement dit, ce congé s’adresse surtout aux salariés déjà installés dans leur vie professionnelle. Les jeunes actifs devront patienter avant d’envisager une telle coupure.

Concrètement, la démarche pour demander un congé sabbatique est relativement simple, mais doit respecter certaines règles. Il suffit d’adresser une lettre à son employeur au moins trois mois avant la date de départ envisagée. Ce courrier doit préciser la durée choisie (entre six et onze mois) et mentionner explicitement qu’il s’agit d’un congé sabbatique.

L’employeur dispose alors de 30 jours pour répondre. Trois scénarios sont possibles :

  • Accorder le congé, sans conditions.
  • Reporter le départ, pour des raisons d’organisation, dans la limite de neuf mois.
  • Refuser la demande, mais seulement si les conditions légales ne sont pas réunies.

L’absence de réponse de l’employeur vaut acceptation. Une décision de la Cour de cassation en 2024 est venue confirmer que ce principe s’applique même si la demande n’était pas parfaitement conforme. Mieux vaut donc répondre !

Une liberté qui a un prix

Une fois le congé accordé, le salarié dispose d’une totale liberté d’organisation. Certains en profitent pour parcourir le monde, d’autres pour reprendre des études ou lancer un projet personnel. 

Mais cette liberté a des contreparties :

  • Le salarié n’est pas rémunéré.
  • La période de congé n’est pas comptabilisée dans l’ancienneté.
  • Aucune cotisation retraite n’est versée, sauf choix volontaire.
  • La couverture Sécurité sociale reste assurée.

Il est possible de travailler ailleurs pendant le congé, à condition de ne pas rejoindre un concurrent direct et de respecter d’éventuelles clauses contractuelles. Rien n’empêche, par exemple, d’enseigner, de travailler dans un autre secteur ou de monter un projet personnel.

Le retour, une étape à ne pas négliger

Au terme du congé sabbatique, le salarié reprend sa place dans l’entreprise. Deux cas de figure se présentent : soit il retrouve son poste initial, soit il occupe un emploi équivalent, avec un salaire identique et des responsabilités adaptées à ses compétences.

La loi protège ainsi le salarié contre toute rétrogradation. Mais la réalité peut être plus nuancée : après plusieurs mois d’absence, l’entreprise a évolué, les équipes ont changé, et le salarié lui-même revient souvent transformé.

Certains salariés reviennent motivés comme jamais, d’autres décident de donner un nouveau cap à leur carrière. C’est pourquoi de plus en plus d’entreprises organisent un entretien de retour, pour faciliter la réintégration et ajuster les missions.

Un levier de performance et de bien-être

Pour l’employeur, un congé sabbatique peut représenter un défi. Comment compenser l’absence d’un collaborateur pendant plusieurs mois ? Dans une petite structure, l’impact peut être lourd. Dans une grande entreprise, il exige une réorganisation, parfois un recrutement temporaire.

Mais beaucoup choisissent de voir le verre à moitié plein. Laisser partir un salarié, c’est aussi miser sur son retour. Un collaborateur qui a pu vivre un projet personnel revient souvent plus épanoui, plus créatif et parfois porteur de nouvelles compétences.

Le congé sabbatique peut ainsi devenir un outil de fidélisation et de qualité de vie au travail, en montrant que l’entreprise sait accompagner ses salariés dans leurs aspirations personnelles.

Bien préparer son congé : quelques clés

Pour que l’expérience soit réussie, une bonne préparation est indispensable.

Côté salarié :

  • Prévoir un budget solide pour vivre sans salaire pendant plusieurs mois.
  • Donner une direction à son projet, même si la loi ne l’exige pas.
  • Garder un lien minimal avec l’entreprise pour faciliter le retour.

Côté employeur :

  • Répondre dans les délais, pour éviter un accord tacite.
  • Organiser l’absence en redistribuant les missions ou en recrutant temporairement.
  • Expliquer la situation à l’équipe, pour éviter les tensions.

D’autres solutions pour souffler

Le congé sabbatique n’est pas la seule façon de prendre du recul. D’autres dispositifs existent :

  • Le congé sans solde, plus souple mais sans garantie de retour.
  • Le congé pour création ou reprise d’entreprise, qui peut durer jusqu’à deux ans mais reste réservé à un projet entrepreneurial.
  • Des aménagements du temps de travail (temps partiel, télétravail temporaire), qui permettent de ralentir le rythme sans couper totalement le lien professionnel.

Dans un monde du travail en quête de sens et d’équilibre, il s’affirme comme une respiration précieuse, bénéfique à la fois pour l’individu et pour l’entreprise. Voyage, formation, création ou simple recul : cette parenthèse n’est pas une fuite, mais un investissement sur soi et sur son avenir professionnel.

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