Et si les entreprises délaissaient le système des 5 semaines de congés payés pour autoriser les salariés à prendre le nombre de jours de congés qu’ils souhaitent ? Voici la nouvelle pratique de certaines entreprises françaises, en grande majorité des start-ups qui souhaitent répliquer les pratiques américaines.
Comment cela fonctionne-t-il, quels sont les avantages et les risques d’une telle méthode de gestion ? Kammi fait un tour d’horizon !
Congés illimités : comment ça marche ?
Netflix ou Virgin, voici deux exemples d’entreprises de l’Outre-Atlantique qui ont lancé une nouvelle manière de gérer les congés des salariés. On appelle cela : « les congés illimités ». Concrètement, cela consiste à ne pas fixer de limite dans la comptabilisation des absences des salariés, ces derniers pouvant prévenir le matin même de leur absence, sans justification. Cela ne doit bien sûr pas être néfaste à la productivité de l’entreprise (en effet, un commercial ne doit pas décider de s’absenter le jour d’un rendez-vous client par exemple).
Que dit la loi en France ? Selon le Code du Travail, rien interdit une telle méthode.
Un phénomène qui prend de l’ampleur
En France, le phénomène gagne petit à petit le monde des start-ups comme le site de recrutement Indeed, qui a déployé ce système dans 15 pays, ou encore PopChef, start-up de confection et de livraison de repas.
Quels sont les risques ?
Bien que la pratique soit légale vis-à-vis du code du travail français, l’entreprise prend le risque de pouvoir se faire attaquer par un salarié qui estimerait que la durée du temps de travail n’est pas la même pour tous et ne peut pas prendre autant de congés que les autres.
Quels sont les avantages ?
Entretenir une relation de confiance et motiver les salariés
Ne pas réglementer le nombre d’absences, c’est envoyer un signal fort à ses salariés : celui de la confiance. D’une part, la confiance envers la qualité et la réactivité de leur travail, et d’autre part, la confiance d’user et non d’abuser de ce privilège. De plus, cela permet aux employés de se libérer du stress que peuvent entraîner certaines contraintes de la vie personnelle (intervention d’un électricien, déplacement à la préfecture, enfant malade, fatigue liée à un weekend un peu trop chargé …) et de repartir de plus belle !
Attirer et retenir les meilleurs talents
Cette nouvelle pratique, tout droit venue des start-ups américaines est un argument très séduisant en termes d’image employeur. L’entreprise renvoie une image moderne et visionnaire et attire les millenials tout droit sorti d’études et à la recherche de toujours plus d’indépendance dans leur vie professionnelle. Par exemple, en Nouvelle-Zélande, l’entreprise RocketWerkz a reçu plus de 600 CVs suite à la mise en place des congés illimités.
Augmenter la productivité des salariés en les faisant penser « résultat »
Cela peut paraître contradictoire : comment le fait de ne pas limiter les vacances puisse rendre les collaborateurs plus productifs ? En réalité, cela est dû à une mentalité et des valeurs de travail tournées vers le résultat. Ainsi, les salariés peuvent s’organiser comme ils le souhaitent du moment que leur travail est efficace. Conscients de ce privilège, les salariés de ces entreprises mettent un point d’orgue à ne pas livrer leur travail en retard et se montrent motivés et boostés. « Tout repose sur la responsabilisation. On offre la liberté des horaires, des vacances comme on veut et le télétravail est autorisé. En échange, on compte sur la responsabilité de chacun, ce qui doit être fait est fait » déclare le créateur de PopChef.
Comment encadrer ce système
Mais, pour que ce système fonctionne, il faut tout de même encadrer l’ensemble. Tout d’abord en fixant des objectifs clairs afin que les collaborateurs aient un indicateur de leur efficacité. En effet, sans objectifs, il sera compliqué de « reprocher » à un salarié qui utilise énormément son droit aux « congés illimités » qu’il n’est pas productif. Par ailleurs, ce système ne prévaut pas sur le Code du Travail français. À savoir que les entreprises souhaitant l’appliquer doivent vérifier que les salariés prennent au moins les 5 semaines auxquelles ils ont droit. Il faut également prendre en compte le mode de calcul de l’indemnité de ces congés. Cela implique que dans le cadre de congés illimités, il faudrait quand même continuer à poser ces jours de congés.
Chez Indeed, Arnaud Devigne, Managing Director précise « On ne se substitue pas au droit du travail. On continue à poser les jours de congés mais on a fait sauter le plafond. » Il est donc important de cadrer les congés avec un logiciel de gestion des absences. Ce n’est pas parce que les congés sont illimités qu’il ne doivent pas être indiqués dans un outil. Ne serait-ce que pour l’organisation interne (planning des absences par exemple).
Quels sont les premiers retours d’expérience ?
Pour le moment, les quelques entreprises à avoir sauté le pas font un retour très positif en signalant qu’aucun abus n’était à déclarer. Chez Indeed aux USA par exemple, le bilan indique que les collaborateurs n’ont pris 3 jours de plus que les deux semaines accordées par le droit du travail. En n’abusant pas du modèle, les salariés cherchent surtout à le préserver.
Un système qui n’est pas adapté à toutes les entreprises
Ce mode de fonctionnement n’est cependant pas adapté à toutes les entreprises. En effet, il colle parfaitement à la mentalité des millenials, ces jeunes qui sont poussés par l’intérêt et la stimulation professionnelle tout en gardant une liberté, plutôt qu’aux structures traditionnelles ou le salaire et l’évolution hiérarchique est le leitmotiv. Les grandes entreprises passeront donc leur tour alors les start-ups se laissent séduire par les congés illimités. Idem en termes de secteur d’activité, on imagine mal un tel système dans l’industrie, le commerce ou la restauration. Si le concept des « congés illimités » séduit de plus en plus de start-ups françaises, il est encore prématuré pour connaitre la véritable ampleur de ce nouveau système. Cela deviendra-t-il la nouvelle façon de fonctionner pour bon nombre des entreprises et les travailleurs de demain, ou bien est-ce un effet de mode ? Sources : le Monde, BFM Business, Challenges et Capital